Pierre herme

Pierre Hermé “Les épiceries fines sont des formidables sources d’inspiration”

Connu de tous les gourmets pour ses pâtisseries créatives et ses macarons exceptionnels, Pierre Hermé est un observateur avisé du monde du goût qu’il ne cesse de parcourir à l’affût de nouvelles saveurs.

Qu’évoque pour vous le monde de l’épicerie fine ? 

Pierre Hermé : Une épicerie fine, c’est avant tout des produits de grande qualité et donc forcément une formidable source d’inspiration. En fait, je trouve toujours une bonne raison de pousser la porte de ce genre de boutique, j’adore m’y promener, fouiller dans les rayons à la recherche d’une huile d’olive formidable, de conserves de sardines ou d’épices. Je suis tout autant attiré par les produits frais : un jambon ibérique ou un Culatello d’Italie, une saucisse exceptionnelle…

Avez-vous des adresses de prédilection ?

P. H. : Bien sûr, je peux vous dire que le Culatello est formidable chez Fauchon et que j’y vais pour ça, comme je peux aller chez Thiercelin pour les épices
et encore ailleurs pour les olives. J’aime bien avoir mes repères mais j’apprécie aussi de me laisser surprendre. Cela m’est arrivé récemment à Forcalquier où j’ai aperçu de loin une épicerie fine qui avait l’air sympa. Je me suis rapproché de la vitrine où il y avait tout un tas de produits incroyables et notamment une très belle sélection de vins et j’y suis entré. Je n’ai pas été déçu ! La boutique proposait une sélection de produits étonnamment riche et j’ai eu plaisir à partager avec
le propriétaire, un ancien parisien reconverti en épicier fin. C’est le bonheur de la découverte.

Selon-vous, qu’est-ce qui a changé en matière d’épicerie fine ces dernières années ?

P. H. : Il y a quelques années, j’ai entendu sur France Culture une personne qui parlait du miel qu’il produisait en région parisienne ; un miel d’exception baptisé avec humour le Miel Béton. J’ai eu envie de la rencontrer et je suis donc allé voir cette personne qui était alors totalement inconnue. Je n’y suis pour rien, mais trois ans après, on trouvait son miel dans plusieurs épiceries à Paris. Pour répondre à votre question, cela signifie que le développement des moyens de communication fait que l’information sur les produits d’exception circule beaucoup plus vite. Il n’y a plus de petites adresses secrètes, confidentielles : l’accessibilité aux bons produits a complètement changé.

Nous avons réalisé une enquête dans laquelle il ressort que, pour 53 % des personnes interrogées, l’épicerie fine est un “petit luxe qui reste accessible”. Que vous inspire cette réponse ?

P. H. : Je le comprends parfaitement. La confiture et le miel sont effectivement accessibles. Par exemple, quand vous allez chez Maille, place de la Madeleine, vous payez la moutarde à la truffe noire et au Chablis 10 ou 11 € le pot. Ce qui n’est pas du domaine de l’impossible. Et l’on peut en effet considérer que ça fait partie des petits plaisirs qui ont leur importance dans l’esprit des Français. En pâtisserie, c’est un peu la même chose car la haute pâtisserie est beaucoup plus accessible que la haute gastronomie. Chez moi par exemple, le ticket d’entrée pour un macaron est de 1,95 € et, au maximum, de 7 € pour un petit gâteau. Bien sûr, c’est de l’argent, mais cela reste accessible. D’ailleurs, le succès des macarons ne se dément pas.

L’autre valeur forte de notre enquête est le lien étroit établi entre épicerie fine et spécialités régionales.

P. H. : Cela ne me surprend pas. Les produits de haute qualité sont en général liés à une région, une provenance, un savoir-faire… et c’est souvent un
savoir-faire régional. C’est vrai par exemple pour les miels qui ont une origine, comme celui du Gâtinais. C’est également vrai pour les sardines de la Belle-Iloise, conditionnées dans la région de Quiberon.

De votre côté, comment percevez-vous ce marché ?

P. H. : Je crois que l’on y trouve des produits de plus en plus pointus, de plus en plus exclusifs, avec une dimension créative et originale. En même temps, le traditionnel très bien fait, dans sa meilleure expression, conserve tout son pouvoir de séduction.

Vous avez des points de vente* en France, en Angleterre, au Japon, à Dubaï et, depuis peu, à Hong Kong : l’attrait pour l’épicerie fine se retrouve-t-il à l’international ?

P. H. : Oui, on le voit ailleurs même si ce sont souvent des produits français qui sont proposés. On trouve de très bonnes choses au Japon où je ne rate jamais une occasion de faire mon shopping. J’en rapporte des sauces soja extra, du sucre brun japonais, du riz de la dernière récolte, du wasabi frais, des yuzu…

Pensez-vous ouvrir un jour vos points de vente aux produits de l’épicerie fine ?

P. H. : Nous proposons déjà une petite sélection de confitures, de pâtes à tartiner et de confiserie, mais nous devrions en rester là. Il n’est pas dans mes projets d’élargir cette gamme.

Retrouvera-t-on un jour vos macarons chez les épiciers fins de France ?

P. H. : Non. Tous nos produits sont exclusivement en vente chez nous. Cela répond à notre volonté
de contrôler la manière dont on vend nos produits.

Propos recueillis par Bruno Lecoq/Photos : Jean-Louis Bloch Lainé

* 14 points de vente en France, 2 en Angleterre,
1 à Dubaï, 12 au Japon et 1 boutique à Hong Kong.

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